Tous nos jours parfaits ; Jennifer Niven

Fiche d’identité ;

J’ai été écrit par Jennifer Niven et je suis sorti en septembre 2015 aux éditions Gallimard. Je suis un petit pavé de 377 pages, mais n’ai pas peur ! Si je t’intéresse, tu me trouveras au rayon des romans jeunesse, peut-être bien du côté des drames. Parce que oui — et loin de moi l’idée de te faire peur — je crois pouvoir dire sans me vanter que j’ai de quoi faire pleurer dans les chaumières…
Synopsis ;
Quand Violet et Finch se rencontrent, ils sont au bord du vide, en haut du clocher du lycée, décidés à en finir avec la vie.
Finch est la « bête curieuse » de l’école. Il oscille entre les périodes d’accablement, dominées par des idées morbides et les phases « d’éveil » où il déborde d’énergie. De son côté, Violet avait tout pour elle. Mais neuf mois plus tôt, sa sœur adorée est morte dans un accident de voiture. La survivante a perdu pied, s’est isolée et s’est laissée submerger par la culpabilité.
Pour Violet et Finch, c’est le début d’une histoire d’amour bouleversante: l’histoire d’une fille qui réapprend à vivre avec un garçon qui veut mourir.

Mon avis ;

Je ne sais plus quand ni comment j’ai entendu parler de ce roman ; tout ce que je sais, c’est que je n’avais jamais lu le synopsis — parce que dans le dos du bouquin, il n’y en a pas. Simplement quelques extraits, et cette phrase « L’histoire d’amour de Violet qui réapprend à vivre avec Finch qui veut mourir. » Ça m’a tapé dans l’œil, tout de suite. Vous l’aurez peut-être remarqué à force de voir mes choix de lecture ainsi que mes coups de cœur, et ceux qui me connaissent en écriture aussi le savent : j’adore les personnages tourmentés, j’adore quand ça cause dépression et/ou suicide. Ce sont des thématiques sur lesquelles j’adore lire ou écrire, sans doute parce que j’ai un côté masochiste et que j’aime pleurer face à ces personnages bouleversants. Tous nos jours parfaits, je le savais, avait été le coup de cœur de bien des personnes ; je n’ai pas passé le pas de l’acheter, parce que je le préférais en VO dans ma bibliothèque, mais il a fait partie de mes nombreux emprunts médiathèque lorsqu’il m’est passé sous les doigts.
Il a été l’un des bouquins que j’ai lus le plus rapidement, je crois ; parce que l’histoire m’a envoûtée, parce que la narration m’a charmée, parce que les personnages m’ont conquise, tout simplement.

— Écoute, je suis un fêlé, un cinglé. Je fous la merde. Je me bats. Je déçois tout le monde. Ouh là, ne contrariez pas Finch. Ça y est, il recommence, il va piquer une crise. Finch et ses humeurs. Finch en colère. Imprévisible. Incontrôlable. Fou. Mais je ne suis pas une liste de symptômes. Je ne suis pas le résultat de parents de merde combinés avec des médocs encore plus merdeux. Je ne suis pas un problème. Je ne suis pas un diagnostic. Je ne suis pas une maladie. Je ne suis pas une victime à secourir. Je suis une personne.

Parce qu’il y avait Théodore, toujours appelé Finch, de son nom de famille ; ce garçon dont je n’ai compris qu’après coup, le bouquin refermé, qu’il était certainement ce que l’on nomme « bipolaire » et qui, comme toutes les pathologies, a tendance à effrayer parce qu’elle est méconnue. Finch, l’allumé, Finch, le déjanté, Finch, le violent aux idées qui divergent et divaguent, Finch, l’inconstant. Il n’est simplement pas raccord, il oscille entre les phases de dépression, de « sommeil » marquées par l’enfermement, la solitude et les idées noires, et celles d’ « éveil » au cours desquelles il semble intouchable, insaisissable et capable de refaire le monde entier à son image, un peu déluré, complètement décalé, plein d’étoiles et d’accords de guitare vibrants.

Parce qu’il y avait Violet, Violet, l’adolescente les pieds sur terre, un peu trop même, celle qui a perdu sa sœur dans un accident de voiture dont elle se tient responsable, celle qui a peur, depuis, de conduire, de grimper dans l’automobile d’un ou d’une autre, qui doute et remet en cause son avenir, parce que c’était celui de sa sœur, et pas le sien. Depuis elle s’efface, on l’oublie, on ferme les yeux sur les devoirs en retard, ceux non faits, elle n’écrit plus, plus rien, mais elle a des « circonstances atténuantes » alors qui viendrait le lui reprocher ? La mort a cet effet-là sur les gens : tout à coup, vous devenez un objet fragile et précieux qu’il faut manipuler avec mille précautions pour qu’il ne se brise pas.

— Dis-moi ce que tu as appris.
— J’ai appris qu’il y avait du bon dans ce monde, si on prend la peine de bien chercher. J’ai appris que tous les êtres humains ne sont pas forcément décevants, moi y compris, et j’ai appris qu’un tas de terre de trois cent-quatre-vingt-sept mètres peut sembler plus haut qu’un clocher quand o s’y penche avec la bonne personne.

Tous nos jours parfaits, c’est une histoire un peu dure, qui aborde des sujets difficiles et pourtant d’actualité, plus que jamais. A une époque où les jeunes sont de plus en plus déphasés dans un monde qui part en vrille et qu’ils n’arrivent plus à apprendre, lire sur la dépression et le suicide n’est pas si surprenant. Il paraît que ma génération, celle des quinze à vingt-cinq ans d’aujourd’hui, c’est la génération psys et cachetons. Alors un roman comme ça, qui sonne peut-être un peu trop juste sur certaines problématiques actuelles ? Même pas peur. J’ai aimé la façon dont les crises de Finch étaient dépeintes ; j’ai aimé la romance qui se profilait, jamais niaise, souvent en non-dit, une relation un peu instable qui m’a plu — parce qu’elle montrait qu’on pouvait aimer même quelqu’un que le monde n’accroche pas, que la vie n’attire pas alors qu’il en paraît quelquefois transi.

J’admire tout de même Jennifer Niven de n’être jamais tombée dans le drama que les tournants de l’histoire auraient pu laisser présager — tout du moins, à mes yeux, elle s’en tient à l’écart tout en secouant les émotions de ses lecteurs d’une main de maître. Tout reste toujours un peu doux, je parlerais même d’euphémismes de temps à autres. Les métaphores sont belles, touchantes, et la vérité qu’elles portent est déchirante. Peut-être que ça surprendra, peut-être pas, mais Finch est le personnage que j’ai préféré, parce qu’en plus d’être bouleversant et de m’avoir foutue en vrac, sans dessus-dessous, il était cette dose de légèreté, d’humour qui m’arrachait tant de sourires au fil des pages. Alors que Violet, elle, tout au long des premiers chapitres, m’a fait grincer des dents, grimacer ; j’ai trouvé en elle ce qui me déplaisait tant chez Laurel de Love Letters to the Dead, ou chez Lennie de Le Ciel est Partout : elle se complaisait dans son deuil, elle n’avançait pas, s’en servait comme d’une excuse. C’était moins marqué, peut-être, parce que dans mes souvenirs, la mort de son aînée étaient encore récente. Circonstances atténuantes qui ont assez bien fonctionné sur moi aussi, pour cette fois.

Je ne veux plus entendre cette histoire. Parce que, de toute façon, cet oiseau serait mort, qu’on lui ait permis de pénétrer dans la maison ou non. Peut-être qu’il le savait et que c’est pour ça qu’il a foncé dans la vitre un peu plus fort ce jour-là. Il serait mort aussi chez nous, plus lentement, c’est tout, parce que c’est ce qui arrive quand on est un Finch. Le mariage meurt. L’amour meurt. les gens s’éteignent.

J’ai lu quelquefois que certains passages étaient peu crédibles, comme par exemple cette passion, ce savoir de Finch à propos des étoiles ; je n’ai pas compris. C’était peut-être un peu romancé, évidemment, mais de là à être impossible ? Je ne crois pas ; retenir quelques noms, quelques chiffres, pourvu qu’on les ai lus, qu’y a-t-il d’incroyable à ça ? D’autant plus que, de ce que j’en sais, un bipolaire, durant ses phases maniaques, peut se prendre d’obsession pour un sujet au point d’en assécher la moindre source d’informations — c’est d’ailleurs quelque chose que cette pathologie a en commun avec beaucoup d’autres, si je ne m’abuse.

Chose que je ne fais que rarement je vais me permettre un énorme spoiler sur la fin du bouquin ; il vous faudra surligner pour le lire : J’ai lu certaines critiques absolument incendiaires à l’égard du roman, qui parlaient d’à quel point cette « glorification du suicide » était immonde, qu’on parlait de Finch comme d’un héros. Je ne suis pas d’accord ; à mon sens il ne s’agit pas ici de glorification, d’incitation ou de je-ne-sais-trop-quoi, simplement d’une réalité crue ; les héros sont ceux qui restent, parce qu’ils apprennent de la douleur d’avoir perdu. Finch a insufflé cette force de vaincre à Violet, puis il est parti ; mais la force de Violet est toujours là, et c’est en ça et seulement ça qu’elle parle de Théodore comme d’un « héro » : parce qu’il est celui qui lui a mis des étoiles dans les yeux. Je n’y trouve pas d’incitation ou de glorification, pas de « c’est bien, de se suicider », rien qu’une vérité douloureuse qu’affrontent ceux qui restent quand ceux qu’on aime s’en vont sans retour en arrière possible. [fin du spoiler]

En bref, Tous nos jours parfaits a été un coup de cœur, l’un de ces bouquins qui m’ont fait fondre en larmes en pleine nuit au point d’être incapable de lire la suite tant j’y voyais trouble — l’un de ces bouquins qui m’ont fait sangloter, au lieu de simplement me faire piquer les yeux sans que je ne m’écroule. Les personnages étaient touchants, forts, leur évolution tellement bien menée, certains passages, un en particulier, terriblement déchirants, et la fin si douce-amère, quelque part, avec ce quelque chose d’espoir, de force et de courage qui reste et laisse un arrière goût indéfinissable sur le palais. Une claque.
Juste. Une claque.

Top & flops ;
c’est top ; sujet dur abordé de façon douce, personnages attachants, j’ai adoré détester certains des personnages secondaires, le style est accrocheur et les citations sublimes, mais ça flop ; Violet m’a un peu tapée sur le système au début, même si c’aurait pu être pire et que ça s’améliore — bref, détail.
💕 ; coup de cœur
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